vendredi 2 mars 2012

Les élections

Le dimanche 26 février dernier était une journée attendue et redoutée par la plupart des Sénégalais ainsi que des étrangers. Depuis le vendredi 24 février à minuit, la campagne électorale la plus mouvementée qu’ait connue le Sénégal s’est close, et il ne restait plus qu’à voter.

Depuis le 27 janvier dernier, journée où le Conseil constitutionnel a concédé à Wade la possibilité de briguer un troisième mandat, le Sénégal se déchirait jour après jour, faisant craindre aux Sénégalais ainsi qu’à la communauté internationale que le pays le plus stable d’Afrique soit à feu et à sang à l’issue des élections.

Dimanche dernier était donc une journée redoutée des touristes, qui se voyaient confinés dans la région où ils se trouvaient (les déplacements inter-régionionaux étaient interdits en cette journée d’élections) et les Ambassades et hôtels nous recommandaient fortement d’éviter les déplacements et de ne pas trop traîner dans les rues.

Dès mon réveil, le vote était commencé et tout semblait paisible. Ayant reçu un texto d’avertissement de l’Ambassade du Canada à Dakar, j’ai passé le matin à travailler paisiblement sous ma hutte de palmier avec la connexion internet la plus rapide et la plus fiable que j’aie vue en Afrique. Quand je suis sortie pour aller me chercher à dîner, le gérant de l’auberge m’a dit de me dépêcher à rentrer, car il prévoyait que ça allait chauffer en après-midi. À St-Louis, vers 13h, je n’aurais jamais pu prédire ça. Les rues étaient désertes, la plupart des resto et cantines fermées, on avait peine à croiser âme qui vive.

Après un sandwich, j’ai suivi les recommandations générales et suis retournée travailler à l’hôtel. À 17h45, en ayant marre d’être cloisonnée, j’ai trouvé deux personnes pour m’accompagner observer un bureau de vote non loin d’où on logeait. Puisque les bureaux fermaient à 18h et qu’aucun incident majeur n’avait été rapporté (il faut dire que tous les Sénégalais que je voyais dimanche avaient l’oreille collée à la radio ou les yeux rivés au poste de télévision sorti dans la rue pour l’occasion), il n’y avait aucun risque à l’horizon.

Nous avons donc pu nous rendre dans un centre de vote dans une école primaire et observer (de l’extérieur) un bureau de vote (une classe) faire voter les derniers citoyens. C’était bien drôle car vers 18h, des gens qui jasaient devant l’école depuis notre arrivée se sont rendu compte qu’ils devaient voter et se sont précipités vers leur bureau de vote exercer leur droit au grand dam des responsables qui devaient fermer à l’heure.

Le soir, en me rendant souper, je croise un groupe d’une dizaine de femmes assises dans la rue en train d’écouter l’annonce des résultats partielles. Je leur demande qui mène, elles me répondent que Wade se démarque. Je fais un son de surprise/crainte et elles me disent « Mais tu ne prends pas pour Wade? ». N’ayant pas le cœur de m’embarquer dans un débat avec des personnes qui vivent sous Wade depuis déjà 12 ans et qui souhaitent sa réélection (qui suis-je pour décider de l’avenir du Sénégal?), je leur explique que je laisse au Sénégalais le choix de leur président, tant que les élections sont transparentes. Je leur exprime ensuite ma crainte que ça chauffe si Wade passe au 1e tour. Elles me disent que non (ce sont bien les premières que je rencontre qui n’admettent pas le danger que représente « l’élection » de Wade au 1e tour pour la stabilité interne du Sénégal. Je pars en leur disant en wolof « que Dieu fasse qu’il y ait la paix », elles acquiescent. Tout le monde s’entend là-dessus, qu’on soit pour ou contre Wade.

Au retour de mon souper, elles m’invitent à m’assoir avec elles afin d’écouter l’annonce des résultats partiels. C’est assez pénible somme toute, mais ça semble être la chose la plus divertissante de la terre puisque TOUS les Sénégalais ne font que ça. En gros, ça ressemble à ça : «  dans le département X, dans la commune Y, dans le bureau Z, Wade N voies, Sall O voies… », et ainsi de suite pour les 14 candidats.

Aussi monotone que cette écoute soit (et ce ne sont que des résultats partiels non confirmés), le fait qu’elle soit généralisée (autant les hommes que les femmes que les jeunes sont à l’affut des résultats) démontre toute l’anticipation qu’éprouvent les Sénégalais face aux résultats et surtout aux réactions liées à ces résultats. Malgré toutes les craintes qu’on pouvait entretenir avant l’ouverture des bureaux de vote, les Sénégalais ont été fidèles à la réputation de leur pays et ont agi de sorte que la paix soit. Alhamdoulilah.

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