vendredi 2 mars 2012

Route nationale

Je vous écris présentement de Dakar, puisque n’ayant pas de rendez-vous prévus à St-Louis jeudi et vendredi, j’ai pu fixer des rencontres dans la capitales, où beaucoup d’intellectuels étaient appelés à rester pour les élections. La chance étant de mon côté, un employé de l’OMVS devait se rendre à Dakar mercredi en après-midi et m’a gracieusement offert un lift. Petit aperçu d’un voyage sur la route nationale sénégalaise.

15h30, heure prévue de départ. 16h17, Latyr, le bon samaritain, arrive avec sa voiture devant mon auberge. Je m’engouffre dans l’auto après avoir déposé mes bagages à l’arrière. 16h22, on s’arrête mettre de l’essence, Latyr va acheter des jus et croustilles à l’intérieur de la station, puis on part.

Quelques secondes après qu’on ait quitté la ville, je vois un singe en bordure de route (même moi j’en étais surprise, ça vous donne une idée de l’exotisme de cette vision!). Latyr me dit que c’est bon signe, ça veut dire que le voyage sera agréable. En effet, on a croustilles et jus pour le voyage et les paysages sont magnifiques. Sur fond de reggae, la conversation est enrichissante. J’en apprends encore chaque jour sur le Sénégal et ses habitants par le biais des rencontres que je fais. On parle en fran-lof de tout et de rien, des difficultés de la vie, de l’OMVS, des présidentielles… À un moment, Latyr me dit que Dieu m’a fait un beau cadeau : il m’a donné les gens. Je crois qu’il me dit ça parce qu’au Centre de documentation de St-Louis, tous ont été charmés par mon arrivée en wolof et ma façon humoristique de les revirer dans leurs shorts. Mais j’ai quand même médité sur cette affirmation et je pensais à tous ceux que j’ai hâte de revoir au Québec, puis je me suis dit, c’est vrai, j’ai des gens merveilleux dans ma vie.

À mi-chemin, un policier nous arrête. Prétextant que les bagages ne peuvent se trouver sur le siège arrière, il offre à Latyr le choix de lui payer un pot de vin ou de se faire écrire une contravention. Devant le ridicule de la situation, Latyr lui dit qu’il se fera un plaisir de payer une contravention pour une effraction qui n’existe même pas et qu’il le laisse dans les mains de Dieu. Ça me dégoute de voir à quel point la corruption est facile et endémique. La plupart des Sénégalais n’ont pas un 5000 CFA de « lousse » pour payer alors ils préfèrent payer le 500 CFA nécessaire pour que le policier les laisse partir en paix. Le policier ne semblait même pas avoir honte, et lui qui a dû écrire la contravention à l’intérieur du commissariat semblait trouver un peu embêtant d’écrire une contravention pour une effraction qui n’existe pas, ce qui démontre que rare sont ceux qui se rendent à cette étape… Masi comment peut-on construire un pays quand la corruption est aussi facile (et aussi présente!) à tous les niveaux?

Malgré cette petite mésaventure, Latyr ne perd pas sa bonne humeur et dit « Je ne suis qu’un petit homme, je laisse le reste aux mains de Dieu ». J’ai bien aimé cette attitude au lieu de ruminer pendant des heures les désagréments d’un paiement supplémentaire, mais en même temps, comment les choses pourront changer si on n’a même pas les recours pour contester?

Arrivés près de Tivaouane, les paysages rivalisaient de beauté en raison de la présence de ma forêt de baobab chérie. Au crépuscule, la route est à couper le souffle. Photos à venir. Une fois à Thies (toujours encadrés par la majestueuse forêt), l’auto décide de ne plus avancer à plus de 20km. Il faut dire que c’est une Golf dont j’approxime l’âge entre 20 et 30 ans. On fait quelques longs kilomètres ainsi, puis miraculeusement, elle reprend de sa puissance. Latyr m’explique que ce genre de truc lui arrive souvent, et c’est parce que les gens parlent trop de sa voiture (elle a un excellent système de son et est rapide quand elle veut), ce qui attire le mauvais œil.

Normalement, les taxis et bus ont une queue de cheval accrochée au tuyau d’échappement pour éviter ce genre de désagrément. Ce n’est qu’un peu de maraboutage pour éviter que les mauvaises langues n’aient un effet pervers sur la voiture.

Le reste du voyage vers Dakar se déroule comme un charme. À l’arrivée, j’avais déjà hâte de retrouver ma famille qui commençait à me manquer (depuis déjà deux semaines!). L’accueil a été à la hauteur de mes attentes : Diewo, Mamie et Papou qui se jettent dans mes bras, Mara, Baba, El Hadji, Khalil et Fama qui viennent me saluer tout sourire… On m’avait attendue pour souper, puis après on déguste les clémentines que j’ai apportées (c’est la tradition, quand on arrive d’un voyage de la route, on ne peut pas venir les mains vides). Une fois couchée, Papou vient braver la noirceur pour venir me retrouver dans mon lit, petit coquin! Qu’il est bon de rentrer chez soi…

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire